« Jésus, mon centre, mon tout. »

Le Père Baudouin a été saisi par une grâce de lumière sur le mystère de l’Incarnation et sur « ses divines suites. » Son cœur a été rempli d’un amour ardent, « fort comme la mort » pour la personne de Jésus et son mystère, pour la beauté, l’authenticité de son humanité.
Il a été bouleversé par son amour sauveur et il a soif de répondre à cet amour par un amour ardent.
Il voulait avoir part à sa mission rédemptrice, avec un zèle brûlant, il voulait le faire connaître et aimer.
Ce zèle fut contagieux…
Sur cette route missionnaire il entraîna des disciples avec le souci constant de leur formation spirituel.
- Ne trouver d’admirable que l’Incarnation et ses divines suites,
- Ne pas aller à d’autres écoles,
- Regarder, écouter, se nourrir de Jésus,
- Avoir son zèle ardent et sa douceur,
C’est tout le Père Baudouin formateur, une formation qui transcende les cultures, qu’il a su adapter aux évolutions de la société de son temps.
Cette formation commença dès son retour d’Espagne, aux Sables d’Olonne dans la cachette aménagée chez les demoiselles Guinemand.

Arrivant d’Espagne, Louis-Marie Baudouin entre dans un monde bouleversé, violent mais aussi blessé. Il doit vivre reclus pour échapper à une persécution encore active.
Il ne se perd pas en regrets et en lamentations.
Il essaie de regarder la réalité en face de façon constructive.
Que faut-il faire pour évangéliser les populations meurtries ?
Quels sont les vrais besoins ? où sont les urgences ?
Il vit ce questionnement dans la prière
C’est dans ce divin tête à tête avec le Sauveur des âmes… qu’il a été inspiré de former ces grandes entreprises qui ont amené comme une renaissance de la religion dans ces contrées. Témoignage de M. Fleurisson.
Il le vit dans ses échanges avec M. Lebédesque avec lequel il projette l’établissement d’une société de prêtres qui se mettraient à la disposition des évêques pour l’organisation de missions.
Il le vit dans ses échanges avec des femmes, religieuses pour la plupart, qui ont connu la prison, la déportation et autres tracasseries, et qui fréquentent sa cachette, cherchant à se retrouver pour faire revivre leurs anciens monastères.
Il éduque leur regard sur ce monde en mutation en leur commentant l’Ecriture tel un nouveau Jérôme « assis sur les ruines de Sion, ils s’entretenaient des moyens de les relever », nous dit Mère Saint-Laurent dans ses « souvenirs ».
Il leur fait entrevoir des chemins d’évangélisation tout nouveaux.
Voici ce que nous transmet Mère Saint Laurent :

« Il faudrait, disait-il, commencer ce grand ouvrage par l’éducation de la jeunesse… s’emparer de ces premiers ans pour semer de bons principes dans les écoles que les ecclésiastiques ouvriront sur tous les points de la France. Il importe de former des mères vraiment chrétiennes. Les femmes pourraient beaucoup dans cette grande œuvre. »

« Nous entrons dans une ère nouvelle,il faut oublier la douce solitude de vos monastères, donner l’éducation … non plus sous vos cloîtres mais au milieu du siècle, dans une vie pauvre, laborieuse et toute apostolique. »
Avant même d’avoir fini d’élaborer ses projets, le Père entre de plein pied dans une vie active.
En effet au début de l’année 1800, le gouvernement français tolère enfin l’exercice public de la religion catholique.
La Jonchère, Saint-Cyr en Talmondais et enfin Chavagnes : 3 paroisses que le Père Baudouin va successivement desservir avec un zèle qui très vite dépassera ses forces.
Chavagnes fut particulièrement éprouvé par la Révolution. Le 31 juillet 1801, le nouveau curé abordait donc une paroisse en ruines, une paroisse ou régnait la méfiance, une paroisse qui avait perdu ses références religieuses. Tout était à reconstruire.

Retisser le tissu social, redonner vie aux racines profondément religieuses de cette population en attente d’un nouveau souffle, tel fut la tâche formatrice, évangélisatrice du Père Baudouin qui se voulait « missionnaire du Fils et de la Mère. »
C’est dans ce contexte d’une tâche harassante, à laquelle, seul, il ne peut faire face que le projet de vie religieuse en plein monde prend corps à Chavagnes
Pour tenir dans des situations qui seront parfois difficiles, le Père Baudouin sait qu’il faut le soutien d’une armature solide, une ligne spirituelle forte.
I l trace alors pour les Sœurs un chemin de vie et de prière centrée sur le mystère de l’Incarnation. Il rappelle inlassablement tout ce qui favorise la vie intérieure :
- Faire un cloître avec Jésus dans son cœur
- Un cœur tout à Jésus
- Avec Marie pour modèle et pour Mère
- Une éminente charité :
Mes enfants, conservez la paix et la charité, ayez tous l’amour du corps. L’union des frères est invincible. 16 juillet 1808 - L’évangile comme seul trésor :
Nous, Chrétiens, pourquoi chercher si loin ?. Nous avons le Saint Evangile. Un seul mot de ce livre dit plus que tous les autres livres…30 juillet 1829
Formateur tel un nouveau Jérôme
A une époque où le jansénisme laissait encore de lourdes traces, où une lecture intégrale de la bible par de jeunes religieuses était comme impensable, le Père Baudouin lui, veut former ces dernières en la leur commentant.

Il aimait à se comparer à Jérôme commentant la Bible, c’est avec ce nom d’emprunt qu’il signait ses commentaires. La sainte Écriture apparaît bien alors comme l’unique source de son inspiration pour enseigner et former ceux et celles dont il avait la charge.
Très vite, une interpellation nouvelle : la nécessaire préparation de jeunes au sacerdoce
Plus de 250 prêtres étaient morts du fait de la Révolution. Le Père Baudouin avait déjà commencé aux Sables-d’Olonne et à la Jonchère à préparer quelques jeunes en vue du sacerdoce. Il les fit venir à Chavagnes, très vite d’autres les y rejoignirent : les 3 élèves de 1802 passèrent à 70 en juillet 1805, à savoir 40 pensionnaires et 30 externes, développement que le Père Baudouin n’avait certainement pas envisagé.
Il se voyait missionnaire en paroisse, pendant plus de 20 ans il sera supérieur de séminaire !
L’audace de la foi, la contagion de l’exemple
C’est une attitude constante chez le Père Baudouin :
Il n’attendait pas d’être en possession de conditions idéales pour entreprendre. Sa foi lui en donnait l’audace. Il œuvrait avec les moyens qui étaient à sa disposition, confiant en la Providence.
Il n’avait ni maison, ni professeurs lorsqu’il entreprit de former au sacerdoce les jeunes et moins jeunes qui accouraient à Chavagnes !
Sa vie était contagieuse et il entraînait à sa suite grâce à son exemple.
Il faut citer ce beau témoignage :
L’aspect et les relations du Bon Père n’ont pas peu contribué à ma vocation au sacerdoce, tout en lui était voix pour moi, sa piété et ses vertus m’impressionnaient vivement. Il me semblait qu’il me les inoculait, qu’il les faisait passer en moi .
LOUIS-MARIE BAUDOUIN, 20 ANS PLUS TARD, A PORTÉ UN REGARD SUR CE QU’IL A ENTREPRIS :
Formateur par toute sa vie, il nous a livré quelques-uns de ses secrets dans une lettre du 22 novembre à Mère saint-Laurent :
- Faire confiance à la Providence,
- Etre pauvre,
- Ne pas rechercher les appuis humains,
- Avoir l’Évangile comme seul trésor,
- Agir sans empressement,
- Ne vouloir réaliser que la volonté de Dieu.