
Samedi prochain, 2 février, c’est la journée de la vie consacrée, une initiative du Bx Jean-Paul II.
Parmi les chrétiens, certains font un engagement plus radical.
Vous faites partie de ces religieuses étrangères qui sont en Gironde et qui viennent notamment d’Afrique.
Sr Denyse, bienvenue à Bordeaux. Avec vous, nous allons parler de la vie consacrée.
Comment êtes-vous devenue catholique ?
Je suis de souche chrétienne, Je suis catholique comme mes parents et mes grands-parents. Dans ma famille maternelle, un grand oncle était catéchiste, un de mes oncles a pris sa succession. Le grand-frère de ma mère voulait devenir prêtre, mais les anciens se sont opposés.
Chez nous, être catholique, c’était très exigeant. Quand nous revenions de la messe, l’oncle catéchiste nous demandait ce que nous avions retiré des enseignements de l’homélie. Ça n’était pas facile pour nous, mais on aimait ça.
Avez-vous pensé au mariage ?
A mon jeune âge, je n’avais pas pensé au mariage. Vers 20 ans, j’y ai pensé un peu, mais ça n’a pas duré. Mais j’ai eu plusieurs demandes de mariage, c’est vrai… Le Seigneur appelle à sa suite qui Il veut, comme Il veut et quand Il veut.
Vos parents, qu’en ont-ils dit ?
Mes parents sont déjà décédés… Au départ, lorsque je leur ai fait part de mon projet, nous étions au champ, leur refus était catégorique. Cela ne m’a pas révolté, et ne m’a pas empêché de rester docile comme avant. Je suis restée pendant six ans sans rien dire, mais en les observant. Entre temps, j’ai trouvé du travail.
Six ans après, je leur ai posé cette question comme une blague : « Si le Seigneur, vous demandait de lui en donner un enfant gratuitement pour son service, que direz-vous ? » Le papa me regarde et ne sait pas quoi répondre puis il m’a dit : « Je ne suis pas là pour te bloquer. Je ne suis pas là pour fire la guerre avec Dieu. J’ai attendu que tu m’amènes un jeune homme ici, je n’ai jamais vu ; que tu m’apportes un enfant, rien. Ne dis pas que je suis un blocage pour toi. Suis ta route ! »
Quand j’ai vu que la balle était de mon côté, j’ai écrit ma demande chez les sœurs proches : les Sœurs Ursulines de Jésus. J’ai aussi déposé ma démission à mon lieu de travail.
Après mes premiers vœux, mon papa ne m’a jamais appelée par mon nom, il m’a m’appelée seulement : « ma sœur », il m’adit : « puisque tu es la sœur de tout le monde, tu es aussi ma soeur . » Mais bien sûr que je restais et que je reste sa fille !
Une vie consacrée : qu’est-ce que ça signifie pour vous ?

Une religieuse consacre sa vie au Seigneur, pour le service de l’Eglise et de l’humanité. C’est une vie pour Dieu, au service de mes frères et sœurs. C’est un don pour l’Eglise. Et il n’y a pas que les femmes, il y a aussi des hommes dans la vie consacrée.
Tout baptisé est consacré au Seigneur par le baptême…
C’est le Seigneur qui nous choisit et qui nous met à sa suite. On reste là à sa suite. Je n’avais pas choisi de vivre avec des gens que je ne connaissais pas. Je ne savais pas qu’un jour j’allais vivre avec des sœurs de plusieurs pays, des Françaises, des Anglaises, des Italiennes, des Espagnoles. On est là, on vit en communauté, en Congrégation, on a le même but. On suit Jésus. Toute notre vie est service des autres.
Parlez-nous de votre congrégation.
C’est une Congrégation internationale : les Ursulines de Jésus. Hier, on a fêté Ste Angèle Mérici, la fondatrice des Ursulines. En 1802, en Espagne, le P.Baudouin, a été ébloui par le mystère de l’Incarnation. Quand il est revenu en Vendée et qu’il voulait relever les ruines de la Révolution, il a réuni quelques femmes. Il voulait des soeurs pour enseigner les filles. Il voulait des sœurs pour soigner les malades à domicile et seconder les prêtres dans la pastorale.
Il voulait nous appeler les Filles du Verbe Incarné ou les Adoratrices du Verbe Incarné.
Il a envoyé une personne pour faire reconnaître sa congrégation. Mais le ministre de l’époque a dit : « Si vous voulez enseigner, vous devez vous rattacher à un grand ordre qui existe et que nous reconnaissons : les Ursulines". Comme le P.Baudouin était bon et voulait continuer son œuvre, il n’a pas voulu faire de problèmes pour garder son nom. Il a dit : « L’’histoire, la Providence vous donne le nom d’Ursulines mais nous savons ce que nous sommes. »
Vous êtes la branche féminine des FMI qui sont à Bordeaux…. Certains connaissent bien les Fils de Marie Immaculée (les Pères de Chavagnes), ils sont maintenant à la Bastide.
Pouvez-vous citer deux paroles du fondateur qui vous ont marquée.
Le fondateur, le P.Louis-Marie Baudouin aimait la Parole de Dieu, il la mangeait . Il disait : « Lisez peu et pratiquez ce que vous enseignez »
Mais aussi « Aimez beaucoup, beaucoup, beaucoup encore une fois beaucoup, les pauvres, les indigents, les étrangers, les malades, les orphelins, les veuves, les vieillards. Notre Seigneur les aimait et je vous donne l’exemple… Pratique, pratique, pratique ! »
Et il a dit « Jésus Seul … Jésus Seul ». Il a écrit beaucoup.
Quelle était votre tâche spécifique au Cameroun

Je faisais beaucoup de choses mais je n’avais pas une mission spécifique. Au départ, j’ai été envoyée dans l’extrême-Nord du Cameroun pour une fondation où je m’occupais de la promotion féminine, des enfants du Coop’ Monde, de l’alphabétisation, de la pastorale et de la catéchèse. Dans une autre ville, à Bafia, j’ai fait aussi de la catéchèse dans les collèges et j’assurais le suivi des catéchistes et des responsables des communautés chrétiennes… Ensuite, on m’a envoyée dans une communauté de formation, au noviciat de Nagaoundéré ; là, j’ai assuré le service communautaire et le suivi des communautés ethniques et la catéchèse sacramentelle ainsi que l’éducation à la vie et à l’amour au lycée … Puis, de retour à Ombessa, j’ai été économe au collège Champagnat. A Gondon, j’ai été directrice de l’école maternelle et j’ai accompagné des handicapés. Puis j’ai eu la responsabilité des postulantes du Cameroun.
Qu’est-ce qui a fait que vous avez demandé à venir en France ?
Jamais ! Je n’ai pas demandé à venir en France ! En tant que religieuse, la mission se reçoit.
Etant donné que ma santé s’est détériorée, notre Supérieure générale m’a accordée une année sabbatique pour me refaire, me soigner et me ressourcer. Bordeaux a été choisi comme communauté d’accueil.
Comme la formation permanente est importante à tout âge, je suis souvent partie pour des sessions… Mais, quand je suis à Bordeaux, je dis le chapelet avec un groupe et je rejoins une équipe du Rosaire : deux fois par semaine, je suis avec ces groupes.
Deux ou trois paroles de la Bible qui vous parlent aujourd’hui
Il y en a beaucoup ! « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même qu’il prenne sa croix et qu’il me suive ! »
Je suis marquée par cette parole de la Vierge Marie dans Luc « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon sa Parole »
Le psaume 26 m’a nourrie depuis ma jeune enfance parce qu’on le chantait « Ma lumière et mon salut, c’est le Seigneur ! » Et quand quelque chose n’allait pas, même en pleurant je le chantais.
« Si mon père et ma mère m’abandonnent le Seigneur me reçoit. » Et je voyais devant : soit je me donne au Seigneur, soit il prend ma vie, et je voyais tout : la vie, la croix, tout…

RCF-Le témoignage de Sr Denyse, vous pourrez l’entendre de nouveau le 13 février, le jour des Cendres à 20h30 à la paroisse Ste Geneviève de Bordeaux impasse Elvina Silvan Depuis longtemps la paroisse soutient l’engagement apostolique des soeurs au Cameroun.
Merci Jean-Claude, c’est un privilège pour moi d’être ici et de parler avec RCF de ce que je vis et qui m‘habite .
Pour écouter cet interview par Jean-Claude Dupart « Planète-mon village » du 29 janvier 2013 sur RCF Bordeaux http://podcast.rcf.fr/emission/126909/513786
Cette émission était ponctuée par deux chansons de Simon Nwambeben qui chante en langue bafia et en français.